Une retraite s’inscrit dans le temps et dans l’espace. Sa fécondité dépend du retraitant. Avec saint Ignace de Loyola, quelques conseils sur les attitudes et dispositions à avoir pour faire une bonne retraite.
Quelles sont mes capacités ? Où en suis-je dans la vie avec le Christ ? Suis-je formé aux choses spirituelles ? Lent ou rapide ? Cultivé ou sans culture ? Faible de constitution ou en bonne santé ? Autant de questions à se poser avant une retraite. Saint Ignace de Loyola distingue ceux qui sont lents à trouver ce qu’ils cherchent et d’autres qui sont plus rapides ; ceux qui arrivent à une retraite consolés et pleins de ferveur et ceux qui viennent désolés et sans ferveur ; ceux qui se présentent avec un esprit dégagé de soucis et ceux qui sont occupés par de multiples affaires dont ils ont du mal à se dégager…
Cette connaissance de soi va déterminer le déroulement d’une retraite. Certains auront à prendre des moyens appropriés pour avoir l’esprit libre et disponible. Pour d’autres, il faudra veiller à ce qu’ils ne pourront porter sans fatigue ou dont ils ne tireront aucun profit : une lecture ou un avis constituera « une matière trop subtile et trop délicate pour qu’ils puissent comprendre » (Exercices Spirituels, n° 9).
Chercher et trouver
« Qui cherche trouve » (Lc 11, 10). Ce qui est affirmé ici de la prière vaut également pour une retraite. Que cherche-t-on ? Qu’espère-t-on trouver ? La quête peut n’être pas claire au début. Elle doit alors le devenir durant la retraite. Elle dépend des désirs, inclinations ou attachements qui habitent notre cœur : pauvreté ou richesse, vie longue ou vie brève, mariage ou vie religieuse, etc.
Le désir lui-même de faire une retraite peut être fort ou faible. Chacun doit demander le désir « d’entrer de grand cœur et avec générosité envers son Créateur et Seigneur » (ES, n°5) dans une retraite et de lui offrir cette disponibilité qui lui permettra « de se communiquer lui-même à l’âme, l’enveloppant dans son amour et sa louange, et la disposant à entrer dans la voie où elle pourra mieux le servir à l’avenir » (ES, n° 15).
Des moyens appropriés pourront aider à cette ouverture du cœur : se séparer pendant le temps de la retraite « de beaucoup d’amis et connaissances, ainsi que de beaucoup d’affaires » car, en étant ainsi séparé, l’esprit n’est pas partagé entre beaucoup de choses : « Plus notre âme se trouve seule et séparée, plus elle se rend apte à se rapprocher de son Créateur et Seigneur et s’unir à lui » (ES, n° 20).
Le contenu de la retraite
Une retraite est une démarche du corps et de l’esprit. Elle engage toute la personne et sa liberté devant Dieu. Sa fécondité suppose une mise en œuvre précise. Quand faut-il prier ou marcher, se promener, voire courir, si nécessaire ? L’esprit est engagé pour trouver la volonté de Dieu pour soi : la mémoire pour la vie passée et le déroulement de chaque journée de retraite ; l’intelligence pour réfléchir par une lecture ou une méditation ; la volonté pour éliminer ce qui est superflu et viser le mieux pour mieux faire et trouver ce qu’on désire ; aussi, pour s’adresser avec respect à Dieu et à ses saints.
Cette mobilisation des facultés doit se faire selon un programme déterminé, car « ce n’est pas d’en savoir beaucoup qui rassasie et satisfait l’âme mais de sentir et goûter les choses intérieurement » (ES, n° 2). Le corps ne doit pas être oublié, car il détermine notre liberté et constitue aussi le lieu de l’accueil du don de Dieu. Il en résulte de nouvelles questions. Quand se coucher ? Quelle nourriture ? Faut-il jeûner en retraite ? Quel rapport à la nuit et au jour ? Quelle attention aux autres et à l’espace environnant ? Chacun doit « sentir » ce qui lui est approprié.
La garde des pensées et des sens
Durant une retraite, prière, méditations, lectures et déplacements engendrent des pensées, des désirs, des mouvements intérieurs de joie ou de tristesse. Cela varie d’un retraitant à l’autre : l’un a l’âme agitée ; l’autre, l’âme en paix et en repos. Un autre est tenté, grossièrement ou non. Chacun fait l’expérience de la maitrise et de la non-maîtrise de ces motions. Pour saint Ignace, un certain contrôle des pensées est possible et nécessaire. Il est possible d’éviter qu’une pensée mette en mouvement un monde intérieur contraire à ce qu’on cherche durant la retraite ; de même, pour l’imaginaire qui peut être contrôlé. En rapport avec l’environnement et les personnes côtoyées, la garde des sens (vue, écoute, etc.) va aussi permettre de ne pas sortir du but visé dans la retraite : attention à ce qui est vu et à ce que cette vue provoque en soi ; effort pour demeurer dans la solitude et le silence et ne pas entrer plus que nécessaire en contact avec d’autres retraitants, etc. À travers cette double garde, le retraitant permet à Dieu de le rejoindre et de mieux trouver en retour ce qu’il cherche.
Quelques attitudes pratiques
Pour la prière : ne pas prier selon son goût mais durant un temps défini à l’avance auquel on est fidèle ; pour le coucher et le sommeil : au coucher, repasser brièvement ce qui a été vécu durant la journée et au réveil, orienter ses pensées vers la journée à vivre ; pour le déroulement : éviter l’écueil d’en faire trop et l’autre écueil de n’en faire pas assez ; pour le corps : disposer son corps à entrer dans la prière et ne pas quitter la prière, sans que ce départ aille de pair avec une certaine attitude corporelle. De manière générale, durant toute la retraite, être toujours à la recherche de ce que l’on veut et viser ce qui sera le mieux pour le profit de la retraite.
Père Nicolas Delafon