Chers amis bonjour,
« Rends-moi la joie d’être sauvé ». Ces paroles du psaume de la liturgie de la messe de jour, le mercredi des cendres, jour de notre entrée en Carême, nous placent face à l’essentiel. « Rends-moi la joie d’être sauvé ».
Oui rends-moi cette joie, Seigneur. Je te demande non pas de me la donner mais seulement de me la rendre. Car je l’ai déjà. Ou plutôt je devrais l’avoir. Car je suis sauvé. Mais peut-être que je ne sais plus ce que j’en ai fait, de cette joie.
Si je me mets en route vers la grande fête de Pâques, ce n’est pas pour espérer que tu ressuscites. Tu es ressuscité. Et lorsque nous aurons célébré cette grande fête le 9 avril, tu nous rappelleras que nous sommes ressuscités avec toi et qu’il convient pour nous de rechercher les réalités d’en-Haut (cf. Col 3, 1).
Rechercher ces réalités, vivre en ressuscités c’est, déjà, le propos du Carême. Retrouver la joie d’être sauvés. Nous mettre en route pour retrouver la joie des ressuscités. Nous pouvons demander avec le psalmiste « ne me reprends pas ton Esprit saint », supplier même, et nous entendrons le Seigneur nous répondre : « tu l’as tellement enfoui, mon Esprit, que tu ne le retrouves pas, mais il est toujours là ». Dieu, qui donne toujours sans retour, n’a jamais repris cet Esprit qui, le jour de notre baptême, nous a fait renaître à une vie nouvelle. Et il nous invite à le retrouver. A renouer avec sa présence, au plus intime de nous-même.
Entre notre esprit et cette présence, la présence de son Esprit, il peut ne plus y avoir beaucoup de lien, de connexion, comme on dit aujourd’hui. Le propos du Carême, c’est de la rétablir. En entrant en nous-même, en nous retirant dans notre chambre, comme dit Jésus dans l’Evangile de ce jour, c’est-à-dire en renouant avec la prière, nous le rétablirons.
« Rends-moi la joie d’être sauvé ». Cette phrase est extraite du psaume 50, le miserere, le psaume de la pénitence, celui du pécheur, celui de toute l’Eglise le vendredi matin, à l’office de laudes. Il commence ainsi : « Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour, selon ta grande miséricorde, efface mon péché. Lave moi tout entier de ma faute, purifie-moi de mon offense ». Oui, nous le savons bien. Si nous ne sommes plus connectés à Dieu dont l’Esprit repose en nous, c’est souvent parce que notre péché abîme cette relation. Cette relation oui, qui est un mot quand même infiniment plus beau que le mot de connexion. Relation car Dieu, qui est notre Père, se montre aussi notre ami, celui qui quémande auprès de nous une relation d’amitié. Jésus nous le rappellera, le jeudi saint : « Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis » (cf. Jn 15, 15). Pour renouer cette amitié, ou en tout cas mieux la vivre, centrons-nous sur nos défauts, au lieu de nous préoccuper de ceux des autres. Considérons, avec sérieux et gravité, notre péché. Prenons le temps, sous le regard de Dieu, de regarder ce qui en nous peut lui déplaire. Et déterminons-nous à corriger durablement tel ou tel tort en nous.
« Votre jeûne se passe en disputes et querelles, en coups de poing sauvages » (Is 58, 4a). Et si cette parole était pour nous, pour moi ? Et si Dieu, par le prophète Isaïe, avait envie de nous dire, à nous aussi : « Ce n’est pas en jeûnant comme vous le faites aujourd’hui que vous ferez entendre là-haut votre voix » (Is 58, 4b).
Nous entendons ce jour l’Eglise nous inviter au jeûne. Notre pratique à ce sujet ne doit pas faire abstraction de ces paroles. Pas plus que de celles-ci : « Le jeûne qui me plaît, n’est-ce pas ceci : faire tomber les chaînes injustes, délier les attaches du joug, rendre la liberté aux opprimés, briser tous les jougs ? N’est-ce pas partager ton pain avec celui qui a faim, accueillir chez toi les pauvres sans abri, couvrir celui que tu verras sans vêtement, ne pas te dérober à ton semblable ? » (Is 58, 6-7).
Ce jeûne-là, agréé par le Seigneur, est à la fois jeûne et aumône. Ne nous en privons pas.
« Alors, poursuit Isaïe, ta lumière jaillira comme l’aurore, et tes forces reviendront vite. Devant toi marchera ta justice, et la gloire du Seigneur fermera la marche. Alors, si tu appelles, le Seigneur répondra ; si tu cries, il dira : « Me voici. » Si tu fais disparaître de chez toi le joug, le geste accusateur, la parole malfaisante, si tu donnes à celui qui a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles les désirs du malheureux, ta lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera lumière de midi » (Is 58, 8-10).
Alors sera exaucée ta prière du mercredi des cendres car alors, pourrait-on dire, te sera rendue la joie d’être sauvé.
Je me réjouis beaucoup de vous retrouver chers amis, à raison de deux fois par semaine jusqu’à Pâques. En principe le mercredi et le samedi. A partir de samedi, nous nous laisserons guider vers la joie d’être sauvés à l’aide de paroles du Pape François offertes au monde depuis dix ans, cette année, qu’il est assis sur le siège de l’Apôtre Pierre.
D’ici-là, je vous souhaite un joyeux et saint Carême.