Retraite de carême de Mgr Emmanuel Tois
Tu as voulu que nous te rendions grâce par nos privations : elles rabaissent notre orgueil de pécheurs …
Chers amis bonjour,
Nous n’avons probablement pas tous médité la même page d’évangile ce dimanche. Les uns auront prié à partir de l’évangile de l’année dans laquelle nous sommes, au chapitre 13 de saint Luc, les autres, accompagnant les catéchumènes vers leur baptême, auront eu la Samaritaine, en saint Jean, pour compagne de route. Il en sera de même pour les deux dimanches qui suivront. De ce fait, il n’y a pas une préface unique pour ce troisième dimanche de Carême que nous venons de vivre, et j’ai choisi, parmi toutes celles que le missel propose, la troisième préface. Elle met nos privations au cœur de notre prière, en lien bien sûr avec le jeûne auquel le Seigneur nous invite. Reliées donc à l’invitation qui nous est faite de partager, ce que nous méditerons mercredi, nos privations, dit cette prière de la préface, « rabaissent notre orgueil de pécheurs ».
« Je n’arrive pas à me priver, je n’arrive pas à jeûner », entend-on souvent. « Et d’ailleurs, à quoi çà sert ? ». Et bien voilà : nos privations rabaissent notre orgueil de pécheurs.
Comment ? En nous aidant à nous défaire de notre auto-suffisance, qui nous conduit si souvent, de manière automatique et parfois compulsive, à répondre à tous ces mouvements intérieurs, ces pulsions -ces addictions parfois- qui en mettent un coup, si je puis dire, à notre liberté. Lorsque nous ne comprenons pas en quoi nous priver est un acte de fortification de notre liberté, l’Eglise nous invite à entrer dans un acte de confiance à travers sa prière : « Tu as voulu que nous te rendions grâce par nos privations : elles rabaissent notre orgueil de pécheurs ».
Ainsi, de petits progrès en petits progrès dans la maîtrise de nos avidités, nous grandirons en liberté ce qui, immanquablement, nous conduira à l’action de grâce.
Vous voyez mes amis, quand nous sommes obnubilés par l’aspect moral de la vie et que nous nous comportons honnêtement, nous pouvons être aveugles sur notre péché. Mais si c’est en nous rendant libres que Jésus nous sauve, nous voyons que notre péché, en premier lieu l’orgueil, est surtout le lieu de nos captivités, de nos prisons. Et chaque entrave déliée est une victoire.
Nous entrons dans la prière avec la partie jouée à l’orgue du choral de Carême de Jean-Sébastien Bach : « Ô homme, pleure beaucoup pour ton péché ».
Que Dieu vous garde sur sa route.
Jean-Sébastien Bach, choral de Carême de l’Orgelbüchlein, BWV 622 : O Mensch, bewein’ dein’ Sünde gross, partie jouée à l’orgue.